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La Grèce antique
- 10 000 à – 1 000L’homme de Néandertal est passé par la Grèce, vers – 3 000 surgit du Proche-Orient, un peuple méconnu introduit le bronze et deux plantes prédestinées, la vigne et l’olivier. Les Cyclades se mettent alors à polir leur marbre en statuettes futuristes, et la Crète donne le jour à la civilisation minoenne : cinq palais s’élèvent bientôt, dont celui de Knosos. Santorin, le volcan voisin, explose vers – 1 500.
Sur le continent, les Achéens, d’origine indo-européenne, envahissent le Péloponnèse. Ils s’installent à Mycènes, où ils recueillent les restes de la grandeur minoenne pour donner naissance à une nouvelle culture. Les Mycéniens ne se contentent pas de sculpter leurs célèbres masques d’or, ils ressassent leurs souvenirs de guerre contre Troie, la clef des Dardanelles. Trois siècles plus tard, le poète Homère met tout en vers : la langue hellénique est née. Entre temps, d’autres conquérants ont surgi, les terribles Doriens. Ils tiennent déjà la Crète, et depuis longtemps le sud du Péloponnèse : pour échapper au servage, les Achéens doivent s’entasser dans le cul-de-sac de l’Attique ou fuir vers les îles.
- 1 000 à – 500
Des cités s’imposent : Sparte, Argos et Corinthe dans le Péloponnèse ; Athènes, Eleusis, Mégare et Thèbes dans l’Attique. Chacune a son roi, dont l’autorité s’arrête où commence la loi du sang. Beaucoup de guerrier périssent inutilement dans les allers-retours de la vengeance. Alors, les sages locaux créent une justice dure plus séduisante que les représailles stériles. Dracon crée son code draconien. Lycurgue fait jurer aux spartiates de suivre ses lois jusqu’à son retour – et il se suicide en route.
Après avoir hésité entre monarchie et oligarchie[1], aristocratie et tyrannie, Athènes adopte la démocratie directe : toute décision est votée par l’Ekklesia, l’assemblée de tous les hommes libres ; fonctionnaires et ministres sont élus, les ambitieux sont bannis, et on rend des comptes publics à la fin de chaque mandat. Beaucoup de cités adoptent le système. Mais la terre est ingrate. Il faut multiplier les colonies pour absorber le surplus de population. Ainsi naissent Milet, Ephèse, Byzance, en Asie Mineure ; en Europe, Néapolis (Naples, Massalia (Marseille), Nikaiai (Nice). Très liées à leur cité-mère (metro-polis), unies par la langue commune, les colonies forment vite un puissant réseau commercial qui maille toute la Méditerranée.
- 500 à – 361
L’Empire perse, qui s’étend de l’Egypte à l’actuel Pakistan, y voit une concurrence. En – 490, à la suite d’une émeute fiscale des grecs de Milet, Darius fait porter le chapeau à Athènes. Son armée débarque à Marathon. Au lieu de se retrancher, les athéniens attaquent : surpris, les perses perdent tant d’hommes que Darius renonce.
Son fils Xerxès veut laver l’affront. Il jette un pont de bateaux de 2 km sur le détroit des Dardanelles et ses troupes marchent sur l’Attique, par le nord cette fois-ci. Trois cents spartiates défendent jusqu’au dernier le défilé des Thermopyles. Xerxès passe. Athènes est incendiée. La flotte du Pirée doit se réfugier derrière l’île de Salamine, une souricière dont on ne peut s’échapper que par un mince chenal. Xerxès se frotte les mains. Il plante son trône sur une colline et envoie 1 200 galères. Dans l’étroit passage, c’est l’embouteillage, et engage les bateaux un à un. De son perchoir, le Perse voit les deux tiers de ses bâtiments descendre au fond du golfe Saronique. Athènes a désormais les coudées franches pour s’offrir un âge d’or : construction de l’Acropole par le sculpteur vedette Phidias, duo philosophique de Socrate et Platon, tragédies de Sophocle et d’Euripide, naissance de l’histoire-géo avec Hérodote et Xénophon… Un siècle de prospérité auquel l’habile Périclès, qui se maintient trente ans au pouvoir, va donner son nom. Cela fait des jaloux et, en – 461, la guerre éclate entre Athènes et Sparte. La première y laisse des plumes. La seconde y laisse la vie.
- 336 à 51
Survient un troisième larron : Philippe, le roi de Macédoine, en profite pour annexer la Grèce. L’orateur Démosthène tente de galvaniser les énergies contre lui, mais en – 338, les récalcitrants sont défaits à la bataille de Chéronée. Lorsque Philippe meurt poignardé, deux ans plus tard, il laisse un empire qui va de l’Albanie à l’Ukraine.
Alexandre le Grand, son fils, fait mieux encore : il sème les cités grecques du Nil à l’Himalaya. A sa mort, ses généraux partagent : Ptolémée devient pharaon, Antigonos empoche l’Asie Mineure, Seleuchos la Syrie… Le monde hellénistique est né, qui est à la Grèce ce que l’Amérique sera à l’Angleterre.
51 à 1 087
A son tour, le monde hellénistique est gobé par un autre prédateur, Rome. La Grèce n’est plus qu’un satellite, mais son éclat fascine : César meurt en parlant grec. En 51, un juif hellénisé débarque au Pirée. C’est l’apôtre Paul, qui inonde de ses fameuses épîtres les habitants de Corinthe et de Thessalonique. Trois siècles plus tard, lorsque Constantin prend le pouvoir à Rome, le christianisme devient religion officielle. En 392, l’usurpateur fonde sur le site de Byzance une cité qui porte son nom, Konstantinopolis. L’empire se retrouve avec deux capitales, l’une latine et romaine, l’autre grecque et byzantine. Ravagée par les invasions, Athènes la païenne s’endort.
En 611, les byzantins sont chassés de Syrie. Les nouveaux envahisseurs récusent le culte des images et de la Trinité : ils sont musulmans. Un long grignotage se prépare, pendant que latins et grecs se déchirent. En 1054, à la suite d’un long débat sur la modification du Credo – la profession de foi chrétienne – l’église de Byzance et l’église de Rome se déclarent mutuellement hérétiques. C’est la rupture.
1 087 à 1 453
En 1087, les musulmans écrasent les byzantins à Mantzikert : Constantinople appelle Rome au secours. C’est la première croisade, qui offre aux latins l’occasion de s’installer au Proche-Orient. En 1204, une autre croisade est détournée vers Constantinople, qui est mis à sac. Un flamand devient empereur. Un piémontais devient roi de Thessalonique. Le champenois Villehardouin conquiert la Morée (le Péloponnèse). Vénitiens et francs [2]se partagent la Crète. C’est compter sans Nicée, où une Byzance libre » subsiste, avec son empereur. En 1259, celui-ci capture les chefs francs et échange leur liberté contre la Morée. L’aventure franque tourne court. Constantinople est reprise, mais les turcs ottomans attendent leur heure, à un jour de marche de la capitale.
1 453 à 1 821
En 1430, les ottomans étendent leur domination au nord de la Grèce. Constantinople est prise dans un étau. En 1453, elle tombe aux mains de Mehmet II Le dernier empereur byzantin est mort, l’arme à la main, sur les murs de la ville, mais la légende prétend qu’il s’est caché dans une statue de marbre pour restaurer un beau jour l’Empire grec.
En 1571, les flottes espagnoles et italiennes attaquent les vaisseaux du sultan dans leur hivernage du golfe de Lépante, en face de Patras : les turcs perdent 30 000 hommes et 200 galères dans la terrible bataille. Mais rien ne les arrête, pas même les terribles chevaliers de Rhodes, qui ont dû se replier à Malte ; pas même les Vénitiens qui, en 1669,
quittent Héraklion après un siège si bien mené qu’il inspire un jeune ingénieur militaire, Vauban.
Les grecs d’Asie Mineure ont un statut assez souple au sein de l’Empire ottoman. Dans son quartier du Phanar, dans le nord d’Istanbul, le patriarche reste le chef spirituel de tous les grecs. Autour de lui prospère une bourgeoisie lettrée qui collabore avec les Ottomans. Mais la Grèce proprement dite a un statut beaucoup plus dur, celui de colonie. Les campagnes doivent fournir un quota d’enfants à Istanbul, qui sont convertis à l’islam et enrôlés dans un corps d’élite, les janissaires [3]. Les popes se chargent de l’agitation anti-turque dans des écoles clandestines, et, dans les montagnes, des bandes de « brigands », les kleftedes, forment des foyers de guérilla.
1 789 à 1 829
Quand éclate la Révolution française, la lutte s’intellectualise. Rigas Feraios écrit une déclaration des droits de l’homme à la grecque et des chants séditieux sur l’air de la Carmagnole. Le 25 mars 1821, près de la station de ski de Kalavrita, l’archevêque de Patras brandit le drapeau à croix bleue. C’est la révolution. Au terme de combats qui ne font pas dans le détail, Athènes est libérée. Ce succès pousse les indépendantistes à toujours plus d’audace : Nikitas se taille le surnom de « mange-Turcs », Kolokotronis se retranche à Karitaina, Botzaris fait sauter Missolonghi plutôt que de le rendre.
Quand Chio se soulève à son tour, les turcs massacrent 25 000 habitants. Relayée par les tableaux de Delacroix, la propagande « Philhéllène » gagne les salons. Victor Hugo s’embrase : « En Grèce ! en Grèce ! adieu vous tous ! il faut partir ! qu’enfin, après le sang de ce peuple martyr, le sang vif des bourreaux ruisselle ! ». Son confrère Byron mourra pour la cause, avec 280 autres philhellènes : officiers français, agents russes, escrocs américains… dont l’élan préfigure les brigades internationales de 1936.
En 1827, une escadre franco-anglo-russe coule la flotte turque à Navarin. C’est le coup de grâce. Istanbul abandonne la Grèce… aux luttes de factions, car les puissances étrangères poussent leurs pions dans la coulisse : les russes désignent un gouverneur, Capo d’Istria. On l’abat à Nauplie. Les bavarois dépêchent l’autoritaire Othon 1er. On le force à abdiquer. Les anglais imposent Georges 1er. Il doit s’exiler. Et pendant que la disette bat la campagne, les linguistes s’étripent sur la langue officielle : grec classique simplifié ou grec vulgaire enrichi ?.
1 829 à 1 936
Les politiciens les plus intransigeants veulent reprendre Constantinople : c’est la « Grande Idée ». Plus réaliste, le crétois Venizelos pousse la Grèce à annexer son île natale, avant de l’entraîner dans deux guerres balkaniques et celle de 14 – 18. La Grèce y gagne ses frontières actuelles, plus Smyrne, que les alliés confisquent à l’ex-Empire ottoman en punition de son soutien à l’Allemagne pendant le conflit mondial.
Mais Smyrne, reste à prendre ! Athènes envoie des troupes. D’abord débordée, l’armée turque se ressaisit. C’est la débandade. Les grecs de Smyrne sont exterminés sous les yeux impassibles des alliés, qui mouillent dans la baie. La « Grande Idée » débouche sur la « Grande Catastrophe ».
[1] Oligarchie : régime politique où l’autorité est entre les mains de quelques personnes ou de quelques familles puissantes.
[2] Les francs en Grèce : ils étaient de Champagne, de Champlitte ou de St-Omer. Partis en 1203 pour la croisade, ils se retrouvent à Constantinople à dépouiller l’empire byzantin avec lé vénitiens. La Grèce est une proie tentante : derrière Villehardouin, nos francs raflent tout en cinq ans, et se bombardent ducs d’Athènes, sires de Sparte ou de Thèbes, et, surtout, prince de Morée, avec Andréville (Andravida) pour capitale et Clarence (Killini) pour port d’exportation. Lorsque les byzantins les chassent un siècle plus tard, ils laissent des châteaux un peu partout, et des églises à Andravida, Kardamili, Mystra et Nauplie.
Tags : grec, …, athenes, c’est, 000
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Commentaires
vive sylvie hihi